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Ce n'était pas une année à Holonome

Note d’humeur Tech

Auteur : Barbatronic

Il y a des années où les choix techniques s’alignent naturellement avec le règlement. Et puis, il y a des années comme 2025.

Cela fait maintenant plus de quatre ans qu’on travaille sur — et avec — des robots holonomes. À l’origine, c’était une expérimentation née presque par hasard. Pendant le Covid, une coupe annulée, du temps libre, l’envie d’apprendre… On s’est dit : “Tiens, pourquoi ne pas tenter un robot holonome ?” Jusqu’ici, on faisait du différentiel classique, mais c’était l’occasion d’explorer autre chose.

Les débuts ont été… lents. Surtout pour le robot. Mais très vite, on a vu à quel point ce type de robot ouvrait des perspectives intéressantes côté stratégie : plus de souplesse, plus de liberté. Et quand ça a commencé à fonctionner, on a eu envie d’optimiser, de raffiner. Il a fallu trois bonnes années pour que tout s’aligne vraiment — et l’an dernier, c’était la première fois qu’on avait un robot holonome qui tournait comme on l’entendait.

Alors pour 2025, on a voulu faire une refonte complète du robot, en tirant les leçons de tout ce qu’on avait appris. Pas une version définitive, bien sûr, mais une sorte de synthèse. Et ça a payé : on termine 2e en Belgique, 2e des Légendes à la Coupe de France, et 15e au général. Ce n’était pas prévu. Parce que, soyons clairs, cette année, le règlement ne favorisait pas du tout les robots holonomes. D’ailleurs, en finale, il n’y avait que des différentiels. Je l’avais dit dès le début, en live : “Cette année, faire un robot holonome, ce n’est pas une bonne idée si on veut scorer.”

Mais c’est aussi ça qu’on aime : jouer à contre-courant, tenter autre chose, voir jusqu’où ça peut aller. Et même si on n’était pas ultra compétitifs sur le plan du score pur, ce qu’on a proposé a fonctionné — à notre manière.

Chez les Karibous, on n’a jamais eu l’esprit de compétition dans le sens classique. Être bien classés, c’est chouette, c’est rassurant, c’est une reconnaissance du boulot. Mais ce n’est pas ce qui m’anime. Ce qui compte le plus, pour moi, c’est ce que les gens me renvoient : les messages, les idées qui circulent, les morceaux qu’on voit repris ailleurs, le fait d’inspirer.

Mais avec ça vient une responsabilité.

Depuis les débuts, j’ai toujours bricolé avec ce que j’avais — souvent pas grand-chose — et l’ADN du projet, pour moi, c’était de montrer qu’on pouvait faire beaucoup avec peu. Sauf qu’à force de progresser, de monter en compétence, on a commencé à faire des choses de plus en plus élaborées. Et je vois bien que certaines équipes, parfois en début de parcours, essaient de reproduire ce que l’on fait. Ce qui est hyper flatteur, bien sûr. Mais pas toujours simple.

Même si j’essaie de partager un maximum — en live, sur les plans, les streams, les blogs — certaines choses, notamment l’intégration et la logique globale, restent difficiles à transmettre. En particulier le code, qui repose souvent sur des notions assez avancées, ou sur des choix d’architecture pensées pour notre usage interne.. Ce n’est pas que l’on ne veux pas l’expliquer : c’est juste que ce n’est pas évident à montrer en direct, ni à reproduire sans avoir un peu de bouteille derrière.

Et c’est ça, la limite que je ressens aujourd’hui. Ce que je montre paraît simple, parce que je le fais avec enthousiasme, parce que c’est ce qui rend le projet vivant. Mais pour beaucoup, passer de “je vois” à “je fais” reste un saut difficile, et parfois frustrant.

Alors je commence à me poser des questions : est-ce que je ne devrais pas revenir à des bases plus simples ? Mieux expliciter les choix que je fais ? Insister davantage sur le fait que la réussite ne vient pas d’un capteur miracle ou d’un montage “dernier cri”, mais d’une vraie compréhension, même avec des moyens modestes ?

C’est aussi ça qui me motive avec les Legends : remettre un peu d’humain, d’accessibilité, de “fait maison” dans la compétition. Montrer qu’un robot bricolé, pensé avec cœur et logique, peut aller loin. Et rappeler que la Coupe de France, ce n’est pas qu’une vitrine technologique : c’est un terrain d’éveil, un tremplin pour découvrir, expérimenter, grandir.

Et pour ça, il faut que les nouvelles équipes puissent se projeter. Qu’elles puissent se dire “je peux le faire”, pas “c’est hors de portée”.

Alors non, 2025, ce n’était pas une année à holonome. Mais c’était une bonne année pour réfléchir. Et ça, c’est peut-être encore plus précieux.

Barba.